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Bonet d’âne pour Lucie, l’IA Made in France

Lucie, l’IA générative française se prend les pieds dans le tapis et finit dans les mèmes : récit d’un crash évitable au pays des Gaulois.

Annoncée comme le nouveau bijou technologique français, l’IA Lucie a fait une entrée fracassante… mais pour de mauvaises raisons. Erreurs hilarantes, moqueries en ligne et plateforme suspendue : retour sur un faux départ.

Lucie, l’IA made in France ou plutôt made in fiasco

Elle devait être l’étoile montante de l’IA made in France, celle qui allait offrir une alternative française aux IA des géants américains tels que ChatGPT, Grok ou Gemini. Développée par Linagora avec le soutien du CNRS et du programme France 2030, Lucie promettait une IA éthique et scientifiquement irréprochable.

Mais au lieu d’éblouir, Lucie s’est vautrée dès ses premiers pas dans l’arène numérique, s’attirant plus de moqueries que d’éloges. Sa spécialité ? Les réponses fantaisistes. Demandez-lui le poids des trous dans un gruyère, elle vous répondra fièrement : « entre 10 et 20 grammes ».

Besoin d’un cours sur les œufs de vache ? Pas de problème. Lucie vous vantera sans sourciller les bienfaits de cet aliment… Qui n’existe pas. Lucie est-elle meilleure en calcul ? Pas si sûr. Interrogée sur le calcul (5 (3 + 2)), la plateforme répond dans un premier temps « 17 », puis « 50 ».

Des pépites qui ont rapidement fait le tour des réseaux sociaux. Les internautes, impitoyables comme toujours, n’ont pas tardé à transformer Lucie en mème vivant. On lui attribue des chefs-d’œuvre comme « Hérode, père de la bombe atomique » ou encore « la racine carrée d’une chèvre est égale à 1 ». Sur TikTok et Twitter, certains utilisateurs vont même jusqu’à affirmer que Lucie ferait passer les débuts de ChatGPT pour un triomphe technologique. Résultat : trois jours après son lancement, le rideau est tombé sur Lucie.chat.

Des promesses ambitieuses… et un atterrissage brutal

Pourtant, Linagora avait vendu du rêve : une IA open source, exclusivement nourrie de données françaises, fiable et transparente et conforme aux règles de l’UE. En théorie, Lucie devait donc être le fer de lance de la souveraineté technologique française. Mais la réalité fut moins glorieuse. Erreur numéro un : faire passer une beta pour un produit fini. Erreur numéro deux : sous-estimer la capacité des internautes à débusquer et amplifier chaque fail.

Un accueil qui n’a pas manqué d’irriter Quentin Adam, PDG de Clever Cloud.

Face à la pression médiatique et à l’avalanche de critiques, Linagora a publié un communiqué d’excuses, précisant que cette version n’était qu’un prototype destiné à être perfectionné grâce aux retours des utilisateurs. « Nous avons péché par naïveté », reconnaît Michel-Marie Maudet, directeur général de Linagora. « Nous souhaitions faire connaître Lucie avant la tenue du sommet sur l’IA organisé en France à partir du 6 février, mais nous avons livré quelque chose d’imparfait, sans assez de précautions et de garde-fous. Lucie est un modèle brut, pas prêt à l’emploi, et nous n’avons pas expliqué qu’il est encore très imparfait et destiné à la recherche. Nous pensions pouvoir compter sur les retours de la communauté des logiciels libres, d’habitude bienveillante, pour le faire fonctionner, mais pas avoir à gérer une tempête de french bashing très intense mélangeant tout, les financements, la politique et la science. »

Peut-on encore sauver Lucie ?

Malgré ce faux départ digne d’un sketch, Linagora ne baisse pas les bras. Soutenu par le programme France 2030, le projet ambitionne toujours de développer une IA fiable, éthique et utile. Pour l’instant, seuls des utilisateurs triés sur le volet auront accès aux prochaines versions, histoire d’éviter un nouveau carnage public. Promis, juré : cette fois, les réponses absurdes resteront privées. Interrogé par Le journal Parisien David Fayon, expert en nouvelles technologies et membre du think tank Renaissance numérique, reste optimiste : « C’est une petite erreur au démarrage, mais le projet reste très intéressant et prometteur. L’erreur a été de faire comme aux États-Unis avec une version non terminée, qu’on appelle bêta, soumise aux assauts de quelques utilisateurs pour repérer et corriger les erreurs. En France, on est davantage dans le ça passe ou ça casse. »

Si ce fiasco a fait rire (jaune) la toile, il met en lumière les défis colossaux liés au développement d’une IA nationale capable de rivaliser avec les mastodontes internationaux. Pour Linagora, l’avenir de Lucie passe par des ajustements techniques, une meilleure préparation et un sérieux renforcement des garde-fous. Qui sait, dans quelques années, Lucie pourrait bien être un symbole de résilience française, une success-story née d’un échec viral.

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